Le paiement des heures de délégation : exclusion des frais professionnels non engagés
Le représentant du personnel titulaire dispose d’un crédit d’heures dont il peut user pour l’exercice de ses missions représentatives et syndicales, ce temps étant considéré comme du temps de travail et payé à l’échéance normale.
En application de ce principe légal, le représentant du personnel ne doit subir aucune perte de rémunération du fait de l’exercice de sa mission (notamment Soc, 7 novembre 2007, n°06-41188).
Concrètement, bien que la prestation de travail ne soit pas accomplie, tous les éléments de rémunération constituant une contrepartie du travail doivent être maintenus.
C’est ainsi que les primes compensant des sujétions liées à l’emploi du salarié doivent être maintenues pendant les heures de délégation : une prime de douche (Soc, 2 juin 1992, n°88-45662) ; une indemnité d’éloignement (Soc, 17 janvier 2013, n°11-17745).
Mais la Cour de cassation se prête à une interprétation extensive en imposant également le maintien d’indemnités forfaitaires réparant normalement des frais professionnels :
- indemnité forfaitaire de repas (Soc, 17 mai 2006, n°04-41600)
- prime de panier (Soc, 9 décembre 2014, n°13-22.212)
- indemnité de grand déplacement (Soc, 17 janvier 2013, n°11-17745)
Dès lors qu’une indemnité présente un caractère forfaitaire et que le salarié en aurait bénéficié s’il n’avait pas eu de mandat représentatif, la Cour de cassation tend à qualifier ces sommes de complément de salaire.
Par son arrêt du 3 février 2016, la Cour de cassation vient rappeler une limite importante à cette inflation de l’assiette de calcul du maintien de salaire : le représentant du personnel ne peut pas prétendre au paiement de sommes correspondant au remboursement de frais professionnels qu’il n’a pas exposés.
Ici, des stewarts contestaient l’absence de versement d’indemnités de repas, de « voiture courrier » et de « découcher » versées au personnel naviguant participant à un vol.
La Cour de cassation considère que ce refus est légitime dans la mesure où, malgré leur caractère forfaitaire, ces indemnités constituaient un remboursement de frais et non un complément de salaire.
A cet égard, il faut garder à l’esprit que pour pouvoir être qualifiée de remboursement de frais, l’indemnité ne doit pas être versée à des personnels non susceptibles d’exposer les frais en question.
Si cet arrêt ne lève pas toutes les incertitudes sur l’assiette du maintien de salaire, la Cour de cassation semble revenir à une lecture plus exigeante de la notion de complément de salaire en excluant les remboursement de frais professionnels que les salariés en heures de délégation n’ont effectivement pas exposés.