L’audit externe: un moyen de preuve du licenciement
La Cour de cassation vient enfin de se prononcer sur le droit pour l’employeur de prouver la validité d’un licenciement en s’appuyant sur les conclusions d’un rapport d’audit établi à sa demande par un cabinet d’expertise comptable (Soc. 26 janvier 2016 n°14-19002).
Si une réponse affirmative semble cohérente sur un angle managérial, elle n’était pas évidente au regard de la jurisprudence qui se montre très restrictive sur l’orchestration de preuves par l’employeur.
Ainsi, la Cour de cassation écarte de longue date tous les éléments issus de dispositifs de filatures du salarié hors des locaux de l’entreprise qu’il s’agisse d’une filature par un enquêteur privé (Soc. 22 mai 1995 n°93-44078) ou par d’autres salariés de l’entreprise (Soc. 18 mars 2008 n°06-45093). La sphère de la vie privée du salarié hors de l’entreprise se trouve donc sanctuarisée.
De même, elle a écarté le constat établi par un huissier qui avait organisé un montage en diligentant des clients dans une boutique puis en contrôlant les registres de ventes et de caisses en fin de journée (Soc. 18 mars 2008 n°06-40852). Elle estime en effet qu’il s’agit d’un stratagème déloyal destiné à piéger la salariée.
La même analyse a conduit à écarter l’utilisation comme preuve de clients « mystères » adressés par l’employeur dans des boutiques ou d’enveloppes « piégées d’encre bleue» à la Poste (Soc. 4 juillet 2012 n°11-30266). La preuve doit être loyale même si le comportement du salarié ne l’a pas été tout autant …
En revanche, la jurisprudence autorise bien entendu la surveillance loyale au poste de travail soit par la hiérarchie directe soit par des équipes de contrôle dédiées (Soc. 5 novembre 2014 n°13-18427) sans qu’il soit nécessaire d’en informer préalablement les salariés ou les représentants du personnel.
Concernant les travaux d’audit réalisés par un cabinet d’expert-comptable la Cour de cassation relève que l’employeur n’a fait preuve d’aucune déloyauté à l’égard de la salariée puisque les travaux d’audit ont été conduits sans lui être cachés et qu’elle a même été sollicitée à plusieurs reprises lors de leur déroulé.
La loyauté étant établie et les investigations n’ayant porté que sur la sphère professionnelle, le moyen de preuve est jugé recevable.
La Cour écarte sans grand détail le raisonnement consistant à considérer que l’audit était une collecte d’information personnelle sur une salariée et qu’elle aurait donc dû en être informée préalablement. La finalité de l’audit était manifestement une appréciation beaucoup plus large de la gestion et du fonctionnement d’un service et ne pouvait donc s’analyser comme un dispositif de collecte d’informations sur une salariée donnée.
Le rapport d’audit est donc reconnu comme un moyen de preuve solide dès lors qu’il est établi en toute transparence vis-à-vis du salarié par un professionnel indépendant.