L’utilisation du temps de travail à des fins personnelles constitue un abus de confiance
L’abus de confiance est défini, par le Code pénal, comme « le fait pour une personne de détourner, au préjudice d’autrui, des fonds, des valeurs ou un bien quelconque qui lui ont été remis ».
Cette définition assez large a permis à la jurisprudence d’appliquer le délit d’abus de confiance à des détournements de choses n’ayant pas été remises physiquement.
L’abus de confiance a ainsi été caractérisé, par exemple, lorsqu’un salarié utilise des informations confidentielles, auxquelles il a accès dans l’exercice de ses fonctions, à des fins personnelles.
Par un arrêt du 3 mai 2018, la Chambre criminelle de la Cour de cassation donne une nouvelle illustration de la notion d’abus de confiance appliquée à la matière sociale.
En l’espèce, un employeur avait déposé une plainte auprès du Procureur de la République à l’encontre de deux salariés, se plaignant de leur attitude déloyale.
Les investigations, menées sous l’égide du Parquet, avaient permis d’établir que les salariés avaient créé et développé une activité commerciale, à l’insu de leur employeur.
En ce, en démarchant leur propre clientèle, sur leur lieu et pendant leur temps de travail, à l’aide des moyens informatiques et téléphoniques mis à leur disposition par leur employeur.
De plus, ils avaient détourné des marchés, n’hésitant pas à attirer des clients de leur employeur vers leur nouvelle société.
Le Tribunal correctionnel avait condamné les deux salariés, respectivement, à un an et six mois d’emprisonnement avec sursis.
La Chambre criminelle de la Cour de cassation, approuvant les Juridictions du fond, juge le délit d’abus de confiance pleinement caractérisé.
Pour elle, « constitue le délit d’abus de confiance l’utilisation par des salariés de leur temps de travail à des fins autres que celles pour lesquelles ils perçoivent une rémunération de leur employeur ».
C’est donc ici la force de travail qui a été détournée et caractérise un abus de la confiance que l’employeur avait placé en ses salariés.
Ce faisant, la Cour de cassation offre une voie d’action pour les employeurs confrontés à des actes déloyaux de leurs salariés et qui seraient toutefois insusceptibles de revêtir d’autres qualifications pénales.
Le délit d’abus de confiance est passible de trois ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende.
Aurore TALBOT
Avocat